WeekAway : facilitateur de mobilité professionnelle
Le nombre de professionnels qui travaillent à plus de 200 km de leur lieu de résidence a augmenté de 35 % entre 2008 et 2013 (chiffre publié par L’Insee en 2016). Tout indique que la courbe de ceux que l’on appelle désormais les « navetteurs longue durée » sera exponentielle à l’aune de la crise qui nous appelle à reformuler les contours de l’emploi.
Le concept imaginé par Marie-Christine Crolard et Amélie Queyroi accompagne le quotidien de tous ceux qui vivent dans une région et exercent leur métier dans une autre.
Le Portail du temps partagé s’en fait l’écho depuis plus de 7 ans : les mutations sociétales à l’œuvre nous imposent de repenser nos modèles, tant dans le champ du cercle intime que dans le cadre de l’entreprise. La digitalisation des pratiques, l’impact des préoccupations environnementales, et désormais les mesures de précautions sanitaires (à intégrer sans doute de façon définitive), redessinent les enjeux de nous réapproprier le temps à la faveur de la quête de sens qui nous anime. Souplesse, agilité, autonomie sont devenus les maîtres mots d’une relation professionnelle à construire, relation qui au regard des menaces précitées, ne saurait s’articuler aux dépens de la qualité de vie, devenue primordiale. Pollution, nuisances sonores, logements étriqués à des prix exorbitants…
Les Français sont de plus en plus nombreux à quitter les métropoles pour se mettre au vert, quitte à découper leur semaine entre deux lieux ; à la ville côté pile, à la campagne pour la volte-face. L’exode urbain devient un véritable phénomène de société, à l’origine de la naissance d’une nouvelle tribu, celle des « rurbains ». En témoignent les agences immobilières de l’ouest notamment, qui voient arriver en nombre des familles parisiennes dont l’un des deux parents (le plus souvent le père) s’apprête à multiplier les allers-retours vers le bureau, tandis que l’autre s’installera à temps plein avec les enfants à Angers, Rennes ou La Rochelle. 1 job, 2 villes : ces nomades version moderne auraient-ils un train d’avance ?
« On est jamais mieux servi que par soi-même ». Spécialiste des projets digitaux innovants au service de l’évolution des usages, Marie-Christine Crolard travaille à Paris et à Bordeaux. Elle est cofondatrice de WeekAway.
Marie-Christine Crolard et son associée Amélie Queroy
PTP : Sur quels principes reposent le concept de WeekAway ?
« Notre objectif est de porter l’idée que l’on peut choisir son lieu de vie indépendamment de son lieu de travail. Le marché des personnes qui exercent leur métier loin de leur domicile est en pleine croissance, et cela promet de concerner d’autant plus de monde que le télétravail s’ouvre de beaux jours. Finalement, la principale contrainte à ce changement de vie réside dans la difficulté à trouver un pied-à-terre qui ne soit pas trop impersonnel et surtout à un prix abordable. Quand on est focus sur son boulot, il faut pouvoir se libérer le cerveau des contraintes de la vie quotidienne. Le transport, les commerces disponibles alentour ne doivent pas être une question. C’est cela qu’apporte WeekAway : vous n’avez pas de souci à vous faire, vous avez un point de chute dans un quartier auquel vous êtes habitué, dans un logement que vous connaissez, où vous pouvez laisser l’essentiel des affaires dont vous avez besoin pour éviter de les transporter à chaque trajet, contourner la case resto en solo…Un second « chez-soi » en somme ».
Comment fonctionnez-vous ?
« À la base, WeekAway c’est une plateforme en libre accès que nous avons lancée avec mon associée Amélie en 2019. La crise a fait office d’accélérateur du dispositif et une troisième personne nous assiste à l’opérationnel. Le site permet de mettre en relation des propriétaires qui, pour conserver leur appartement où ils ne résident plus à plein temps choisissent de le mettre en disponibilité quelques jours par semaine, et des professionnels en mobilité récurrente. Ensuite, intervient le besoin de se parler, de se rencontrer. C’est pourquoi nous n’avons pas souhaité automatiser cette partie, qui se gère en direct. Pas de paiement en ligne, rien de tout cela, du fait de ce besoin de contact. Certains choisirons de faire un essai sur 15 jours, chaque formule s’articule après de façon personnelle, c’est important pour le propriétaire tout comme le WeekAway. Avant de trouver mon point de chute à Bordeaux, nous avons organisé un dîner avec la personne loueuse pour faire connaissance. Mais nous travaillons aussi sur mandat. Certains ont besoin d’un accompagnement sur mesure pour un gain de temps ou parce qu’ils sont sur une zone qui n’est pas forcément couverte, où qu’ils aient des exigences particulières (près d’un parc pour faire son jogging…). Dans ce cas nous allons sourcer des biens dans l’offre existante mais aussi ailleurs, pour leur proposer des offres susceptibles de leur correspondre. De plus en plus d’entreprises nous sollicitent également, soit qu’elles souhaitent motiver des talents qui ne sont pas forcément prêts à déménager ou conserver ceux qui ont fait le choix d’un mode de vie plus proche de la nature. À aujourd’hui, nous disposons d’environ 500 offres de locations à Paris, Bordeaux, Lyon, Nantes, Niort, et comptons plus de 2000 membres inscrits ».
Quel est le profil des WeekAway ?
« Des freelances en mission, des collaborateurs qui interviennent sur deux sites (comme Sanofi qui a deux sièges à Paris et à Lyon), des professions libérales : professeurs d’université, médecins qui exercent sur deux communes, tout le monde est concerné… L’année dernière par exemple, l’armée nous a contactées pour faciliter le logement d’officiers. À peu près 10 % d’entre eux sont des « célibataires géographiques » (ils bougent tous les 3 ans et les familles ne suivent pas systématiquement). Nous avons travaillé à les loger à Paris, Rennes, Brest et Toulouse. Nous savons ouvrir des villes ».
Des perspectives d’évolution à présent que la plateforme a prouvé sa pertinence par son dynamisme ?
« Nous sommes en train de lancer un club pour accompagner davantage encore le quotidien de cette communauté de « commuters » qui partagent le même mode de vie. Lorsqu’on est loin de la famille et de ses repères, le sentiment de solitude peut être difficile à porter pour certains. Des hôtels nous proposent spontanément de recevoir nos membres pour le verre du mercredi soir. De nombreux autres services supplémentaires viendront bientôt enrichir notre offre, comme la mise à disposition à des tarifs préférentiels de bureaux dans des espaces de coworking. Nous travaillons les partenariats pour nous adapter à la demande et proposer un ensemble de prestations sur-mesure à tous ceux qui naviguent entre deux régions ».
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